La fin du monde ? Pour demain après-midi 15H30 - volet biologique, épisode I
Fin d'été 2004, la France est en état de choc, un chiot atteint par la rage importé illégalement du Maroc est détecté sur le territoire national. La machinerie étatique et médiatique se met en branle, on imagine déjà le pire, des dizaines de chiens, ainsi que des enfants, des adultes mordus ou ayant été en contact avec l'animal, sont suspectés d'être contaminés. L'épidémie est presque hors de contrôle, si rien n'est fait une hécatombe endeuillera la France, les autorités sont inquiètent et se mobilisent. L'image du chien écumant de bave, les crocs sortis, déambulant dans les rues à la recherche d'un délicieux bambin à mordre se propagent. Les annonces alarmantes se multiplient, la presse en fait ses gros titres, la télé y consacre des émissions, le plus souvent en empruntant un ton d'épouvante. Un climat de peur se met en place, de cette peur qui pousse à tous les excès, la psychose est en marche, les solutions radicales sont à portée de main.
Le 4 septembre ministère de l'Agriculture prend des mesures de lutte contre la rage, les départements de la Dordogne, de la Gironde et du Lot-et-Garonne, où se trouverait le chiot sont en état de siège. Le massacre des chiens plus ou moins errants est avalisé, sous prétexte qu'ils pourraient avoir la rage (notez l'emploi du conditionnel), les chasseurs ont interdiction de sortir leurs bêtes. "Des patrouilles municipales équipées de lassos, de fusils hypodermiques et de voitures dotées de cages font la chasse aux animaux errants. Tout propriétaire de chien doit présenter un carnet de vaccination en règle. « On ne laisse qu'une seule chance. S'il se retrouve à nouveau en infraction, l'animal est conduit à la SPA et euthanasié au bout de huit jours », précise Pascal Landes, responsable de la police municipale de Périgueux. Un fichier centralise l'identité de toutes les personnes contrôlées."* L'élimination de tous les chiens non-vaccinés, pour préserver la population est même envisagée dans la presse par quelques politiciens. Les numéros d'urgence mis en place par les préfectures sont rapidement débordés. Dans ces zones un couvre-feu canin est appliqué, sous l'office des forces de l'ordre massivement mobilisées. "A Léognan, ville de 8 000 habitants, le maire trouve raisonnable de demander à ses services techniques de nettoyer les abords du lac Bleu. Avec ordre de ramasser tous les objets ayant pu être mordus par le chien : balles, bouteilles en plastique, jouets... L'accès au lac par mesure de précaution est interdit."*
Une brèche infidécimale dans le principe de précaution donne lieu à une déploiement de force ahurissant, à une froide réplique où les sentiments n'ont pas leur place. On se souvient de cette vielle dame prenant le maquis pour sauver son chien, et de sa famille morte d'inquiétude. Un cas parmis d'autre. Il faut dire que la perspective d'imaginer le cerveau de son compagnon à quatre pattes réduit en bouillie, n'est pas de nature à susciter l'apaisement. Ce procédé un rien barbare étant le seul moyen de détecter la maladie avant l'apparition des symptômes. Et tout cela pour un chien enragé... Sans doute que nos ancêtres, confrontés régulièrement à cette maladie, auraient ri devant l'agitation provoqué par si peu de chose. Mais nous qui possédons le vaccin, qui sommes éduqués, qui avons la science à nos côtés, sommes effrayés par la simple évocation d'une maladie presque disparue de nos contrées, qui réveille dans l'insconcient collectif une inquiétude qui nous est devenue difficilement gérable. Même si beaucoup ont pensés que les choses allaient un peu loin, l'inquiétude n'en n'était pas moins réelle, ce qui démontre si cela est encore nécessaire le pouvoir de la suggestion. Les esprits étaient globalement rassurés par le fait que le pouvoir politique prenne les choses en mains. Il en faisait peut-être un peu trop, mais au moins la population se sentait en sécurité. C'est la même logique qui est à l'oeuvre, quand des gens se disent rassurés d'être filmés et fouillés à tous les coins de rue.
Cela démontre à l'envie, que la moindre attaque terroriste de nature biologique sur le pays, même si le nombre de victimes se comptent sur les doigts d'une main, aurait des conséquences ravageuses sur le moral de la population. Il ne faudrait pas grand chose pour mettre un pays développé à genoux, la peur suffit. Cela ouvre de grandes possibilités à des terroristes disposant de très peu de moyens. Les conséquences économiques et morales sur nos populations, de l'introduction de quelques animaux enragés en Europe, dépasseraient de beaucoup le coût modique de l'opération.
L'affaire en elle-même prendra fin dans un silence presque assourdissant, en définitif après plusieurs mois de rechercher le chiot est retrouvé, aucune contamination n'est à déplorer. Fin de l'histoire. De tout façon elle est déjà oubliée. Vous croyez qu'elle aura servi de leçon ? Que nenni, le SRAS permettra un remake avec un scénario légèrement retravaillé et un plus gros budget.
* source : Le Point
- Vae Victis
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